Ménigoute, qui fait partie du Pays de Gâtine, est la commune natale de l’avoué Henri Ardouin, maire de Bressuire de 1898 à 1901. La famille lui garde un attachement particulier, et Paul Ardouin y fera de fréquents séjours. Il y écrit certains poèmes de son recueil « Lambeaux de mon rêve », publié en 1921 chez le libraire niortais Georges Clouzot. Le poème intitulé « Ménigoute » commence ainsi :
« Je suis venu en pieux pèlerinage/retrouver le pays qu’a connu mon jeune âge,/Ménigoute, qui rit au chaud soleil d’été,/Nimbé, sur son coteau d’un rayon de gaité./La Vosne dans ses prés, paresseuse s’épanche/Et couvre les rochers de son écume blanche./Tout éclate d’amour en la jeune saison,/Tout rit et tout renaît./J’ai revu la maison,/J’ai revu le jardin où mes rêves d’enfance/Flottent dans un nuage, encor, malgré l’absence/Et j’ai prié dans l’ombre, ainsi qu’Olympio./Je t’invoque, passé, je t’invoque, Clio,/Muse du souvenir, redis-nous Ménigoute./Comme une eau pure qui s’écoule goutte à goutte,/Abreuve en moi le cœur fervent, jamais lassé,/Éclaire le présent des flammes du passé ! »
Le Fonds Ardouin comprend une dizaine de photographies de Ménigoute et de la Gâtine : de très belles photos de cortèges de mariage, des portraits de communiantes ou de familles de paysans, ainsi qu’une vue de la Chapelle Boucard, monument emblématique de la commune.
Merci à Nicole et Stéphane Darmani, responsables des collections du Musée de la vie rurale et de la coiffe à Souvigné, dont les éclairages précieux, d’une grande érudition, ont permis l’interprétation de plusieurs photographies.
Procession de communiantes à Ménigoute. Commentaire des responsables des collections du Musée de la vie rurale et de la coiffe à Souvigné : « On peut voir une forte proportion de bonnets poitevins (plats ou avec ruchés), mais aussi un type de coiffe, la Malvina. On en reconnaît facilement trois, une au milieu du groupe de femmes à droite, deux à gauche (une au-dessus de l’épaule du curé, et une un peu plus à gauche au même niveau, au-dessus d’une couronne de communiante). Peut-être une dernière au fond au pied du mur, entre les deux communiantes du premier plan. Nous sommes donc dans la zone des Malvina, et l’image est typique de la coiffe de Ménigoute. Le porche est celui de l’église Saint-Jean-Baptiste de cette commune, reconnaissable à ses contreforts et l’appareillage de ses murs. On reconnaît aussi le pignon de la maison à droite au bord de la photo et on devine le bord du toit du Château Boucard au fond entre les arbres. La photographie a été prise avant 1902, année où a été construit un clocher-porche de style néo-médiéval composite et recouvert d’une flèche d’ardoise. La mode conforte cette idée ».
Portrait d’une communiante, qui faisait très probablement partie de la procession visible sur la photographie précédente, prise à Ménigoute avant 1902.
Photo d’une famille de paysans de la Gâtine. Commentaire des responsables des collections du Musée de la vie rurale et de la coiffe à Souvigné : « La femme est en berthe (type de châle très en mode dans les années 1890) et porte la coiffe Malvina, typique de la région de Ménigoute. Les hommes ont la tenue traditionnelle des paysans, à savoir la blouse bleue ; celles des jeunes hommes semblent plus brillantes car lustrées (plus récentes), que celle du père. Celui-ci porte un chapeau plus ancien, tandis que les fils ont adopté un feutre d’une mode plus citadine (posé à côté de la chaise à droite). Ce chapeau plus ancien est celui qu’on qualifierait aujourd’hui de créchois. Peut-être cet homme est-il originaire de la zone créchoise ou la famille habite-t-elle en limite des deux zones Malvina/Créchoise ».
Photo d’une paysanne de la Gâtine. Commentaire des responsables des collections du Musée de la vie rurale et de la coiffe à Souvigné : « La femme est en berthe (type de châle très en mode dans les années 1890) et porte la coiffe Malvina, typique de la région de Ménigoute ».
Photo d’une famille de paysans de la Gâtine. La mariée ressemble à la jeune femme qui pose en Malvina sur deux des photos précédentes. En l’absence du père, peut-être décédé, ses deux frères semblent l’accompagner en tête du cortège. Commentaire des responsables des collections du Musée de la vie rurale et de la coiffe à Souvigné : « La femme porte une tenue d’une mode un peu dépassée, vers 1880, alors que les enfants ont des tenues plutôt 1890. La mère porte un bonnet poitevin ou bonnet à pans avec un ou plusieurs rangs de ruchés à l’avant (formant comme une auréole).Ce bonnet se rencontre dans les zones où l’on porte les coiffes hautes. Il supplantera souvent ces dernières du fait d’un coût d’entretien moins onéreux que celui des hautes coiffes. Il contribuera à la disparition des coiffes. Il s’agit d’une famille paysanne, comme le confirme le port de ce bonnet. On peut imaginer qu’il s’agit d’une famille un peu plus aisée ou plus moderne que celle de la précédente, puisque l’homme porte le paletot au lieu de la blouse. On peut conforter l’idée que la photo est prise en Gâtine, terre plus traditionnelle que le Sud protestant, car la jeune fille arbore une croix ».
Le cortège d’un mariage paysan pose sur un chemin de campagne. Commentaire des responsables des collections du Musée de la vie rurale et de la coiffe à Souvigné : « La première femme du cortège est la mariée. Elle porte une tenue encore traditionnelle avec berthe (type de châle très en mode dans les années 1890) et tablier, et une coiffe de type « Malvina », agrémentée de fleurs d’oranger. Les autres femmes sont toutes en Malvina. Une seule femme est à la mode de la ville. Les manches de sa robe et son petit chapeau avec des ornements en hauteur, portés inclinés vers l’avant ou le côté, sont typiques de la mode 1898. Parmi les fillettes derrière la mariée, la première porte le bonnet poitevin, la seconde est à la mode de ville (manteau et chapeau). Les hommes sont en blouse. Un seul porte la redingote sur un petit gilet blanc ; il s’agit très vraisemblablement du marié, avec une mode plus moderne, plus citadine que la blouse. L’organisation du cortège, ouvert par la mariée, sans doute au bras de son père, suivie du marié au bras de sa mère, fait penser au départ pour la mairie ou l’église. Si le mariage était célébré, les mariés seraient ensemble. Les bouquets étaient sans doute distribués au départ du cortège par la famille. Ils étaient souvent faits de fleurs artificielles car les fleurs naturelles étaient trop communes et présentes partout ».
Le cortège d’un mariage remonte la rue de Saint-Maixent, dans le centre de Ménigoute. Les femmes portent la Malvina, coiffe typique de Ménigoute, et les hommes le chapeau et la blouse. A gauche de l’image, la maison au toit pentu est aujourd’hui le siège de l’association Mainate, qui administre le Festival International du Film Ornithologique. Le Café des arts, bâtiment aujourd’hui disparu, est décoré de publicités pour Byrrh, vin aromatisé au quinquina, et pour la Maison Crémieux, tailleur parisien
Sortant de Saint-Jean-Baptiste, église paroissiale de Ménigoute, le cortège d’un mariage s’apprête à faire le tour du village. Il passe d’abord devant le café-restaurant « tenu par Magniant », bâtiment aujourd’hui démoli qui masquait l’église primitive de la commune (actuelle Salle Romane). Derrière le mur, également disparu, on aperçoit la silhouette de la chapelle Jean Boucard. Les femmes portent la Malvina, coiffe typique de Ménigoute, et les hommes le chapeau et la blouse.
Monument emblématique de Ménigoute, rare exemple en Poitou du pur style gothique flamboyant, la Chapelle des Hospices, dite Chapelle Jean Boucard, date du XVIème siècle et servit à sa construction d’aumônerie pour les pauvres. Paul Ardouin la mentionne dans son poème « la petite école ». En 1858, lorsque son père Henri Ardouin apprit à lire, la classe primaire se tenait en effet dans ce grâcieux petit édifice : « C’est dans la petite Chapelle/Que mon père apprit l’A.B.C., /Car, près de Dieu, le cœur épèle/La première leçon si belle :/L’oiseau, la rose heureux passé ! (…) Trente bambins assis en file, / Chantant le Ba-be-bi-bo-bu,/C’est aussi doux que l’Evangile/Ou que les doux vers de Virgile,/Ou que l’eau fraîche qu’on a bu!«
Photo d’une ferme, sans doute en Gâtine. Une famille de paysans accueille la famille Ardouin venue lui rendre visite à bord d’un grand break tiré par un cheval noir. Henri Ardouin est à l’avant, assis sur le siège de meneur en compagnie de son fils Paul Ardouin et d’un paysan, identifié sur une autre photographie comme étant un père de famille gâtinais. Sur les sièges de passagers en vis-à-vis, sont assises trois femmes, dont Hélène Foucart épouse Ardouin. Comme le petit paysan en blouse, à gauche, Ardouin père et fils agitent leur chapeau pour saluer le photographe..
Ce déjeuner sur l’herbe rassemble gens de la ville et de la campagne. On reconnaît à leurs vêtements certaines personnes présentes dans la photographie précédente, prise sans doute en Gâtine. C’est le cas, à gauche de l’image, de Paul Ardouin, levant son chapeau, et de son père Henri, ainsi que des deux femmes assises à droite. Loin des poses solennelles des portraits de studios, l’image restitue une ambiance très décontractée, conviviale. C’est l’heure de remplir les verres. On observe des bouteilles, une terrine, un panier, posés « à la bonne franquette » sur la nappe jetée sur l’herbe.