Outre les photographies de la rue Boussi et du château Allonneau, le fonds Ardouin comporte une vingtaine de clichés qui représentent Bressuire au début du XXème siècle. À côté des classiques vues du château ou de l’église Notre-Dame, on appréciera le caractère inédit de prises de vue d’un intérêt ethnographique certain : sortie de l’école publique, vues du cimetière, déplacements des gendarmes à cheval, manifestation en l’honneur du Général André, aperçus de la fête foraine de la place Saint-Jacques, entrées et sorties de ville.
Magnifique vue de la route de Nantes, dont la perspective s’étend de l’hôtel des Vallées au pont de chemin de fer. Au centre, une femme coiffée du bonnet rond semble revenir du marché, portant sur son bras gauche un panier en osier chargé de provisions. Elle est accompagnée de son petit garçon vêtu d’une large blouse. Derrière eux s’égrènent quelques groupes de promeneurs, dont certains se sont arrêtés pour discuter. À gauche une dizaine d’hommes se dirige vers l’entrée de l’hôtel tandis que d’autres s’adonnent à la pêche, assis sur le pont. Accroché en hauteur sur un platane, un panneau indique : « À Saint-Cyprien, hôtel des Vallées tenu par Poisbleau ». La ville s’étend par-delà les rangées des arbres, dominée par le clocher de Notre-Dame.
Vue de la route de Nantes peu avant d’arriver au pont de chemin de fer. À gauche, les maisons correspondant aux numéros 36 à 40 de l’actuel boulevard Alexandre 1er ont gardé la même physionomie. À droite, le mur a été détruit et le jardin remplacé dans les années 1960 par une station Total puis par un parking et un immeuble à usage commercial. La route est en terre battue et les piétons y stationnent sans aucun souci de la circulation automobile, encore très réduite.
Une locomotive à vapeur de type 120 et son tender passent sur la voie ferrée, sans doute à Bressuire. Au tournant du siècle, la ville doit une grande partie de son développement économique et urbanistique au chemin de fer, symbole d’un progrès qui ne manque pas de fasciner les photographes.
La foule se presse devant la gare de Bressuire solennellement pavoisée. Les regards se concentrent sur la porte de sortie des voyageurs, décorée d’une tenture. Près d’elle, on distingue la bannière de la Société musicale bressuiraise, prête à jouer quelques morceaux. L’invité semble d’importance. On peut faire l’hypothèse qu’il s’agit du ministre de la Guerre, le Général André, venu inaugurer, le samedi 24 octobre 1903, le monument élevé à la mémoire des soldats du canton tués au cours de la guerre de 1870-71. Henri Ardouin, président de la section des Anciens Combattants, fit d’ailleurs un discours à cette occasion.
Préparation de la fête foraine sur la place Saint-Jacques. C’est un lieu festif, consacré essentiellement au divertissement, ce qui le distingue de l’espace réservé au commerce et aux échanges. Les forains installent leur matériel acheminé dans une roulotte marquée de l’inscription « Potet à Massais ». C’est l’heure de la pause. Un homme circule les mains dans les poches. Une femme est assise sur les marches du kiosque qui occupe la moitié droite de l’image, en partie caché par de grands escabeaux. À l’arrière-plan, on continue à édifier les attractions qui vont bientôt attirer les visiteurs.
C’est la foule sur la place Saint-Jacques. Les femmes, portant des bonnets ronds, les hommes, coiffés de chapeaux de paille ou de feutre à larges bords, se protègent sous des parapluies. Un petit garçon observe les attractions, hésitant. Il met la main à la poche, s’apprêtant à sortir sa monnaie. Au centre de l’image, on remarque le Rigolarium décoré de magnifiques peintures. Cette attraction présentait des glaces déformantes dans lesquelles le public pouvait regarder les reflets grotesques de son image.
Cette photographie fait penser à un extrait du chapitre VI de la première partie des « Creux de maisons », publié en 1912 par le romancier Ernest Pérochon : « Cette foire de septembre, qui se tenait dans le quartier Saint-Jacques, le quartier neuf de la ville, attirait à Bressuire une grande foule. (…) Les filles s’engagèrent entre deux rangées de baraques qui faisaient, au milieu de la place, comme une rue large et houleuse. Autrefois, quand elles étaient petites, elles s’étaient bien extasiées à cette foire, devant les gens qui font des tours et qui montrent des bêtes. »
Une brigade de gendarmes à cheval traverse le champ de foire Saint-Jacques, à l’emplacement de l’actuelle place de la Libération. L’espace est délimité par des maisons récentes, dans un quartier encore en construction. En arrière-plan, les marronniers de la place Saint-Jacques et, au-delà, la campagne presque vierge d’habitations.
La brigade de gendarmerie à cheval dans un quartier encore non construit de la ville. Derrière la rangée de marronniers, on devine les bâtiments du centre urbain.
Vers 1895. Mis en valeur par un puissant effet de perspective, deux charrois tirés par des boeufs remontent la rue du Four (actuellement rue du Général André). À leur droite se découpent les murs de la scierie mécanique Ligeard (actuel parking Carnot) dont on devine la haute cheminée de briques au dessus-du toit. Au fond se dessine le triangle de la place Carnot (actuellement place des Anciens Combattants), dont la création est alors récente. Trottoirs et réverbères semblent tout neufs.
On retrouve les deux charrois, progressant dans la rue du Four. Ils laissent la place Carnot sur la droite. Cet aménagement est alors tout récent. Pour faciliter la liaison du centre-ville avec la gare, le quartier est profondément remanié dans les années 1890. À partir de 1891, la muncipalité décide de démolir certains immeubles pour créer une place triangulaire qui permettra de raccorder la rue de la Huchette à la partie de la rue Dufour qui correspond à l’actuelle rue du Général André. Des alignements sont également pratiqués, et des immeubles reconstruits. C’est le cas de l’immeuble qui se trouve à l’angle de la rue Dufour et de la place, occupé par un café au rez-de-chaussée. À droite, le futur immeuble des « Nouvelles Galeries » n’existe pas encore. Son futur emplacement est alors occupé par une maison basse, déjà présente sur le cadastre de 1811, ainsi que par la maison contigüe. Ces deux maisons seront détruites au moment de l’élargissement de la rue de la Huchette. Remarquez l’inscription « Rouenneries-Confection » sur la façade de l’actuel 9,rue du Four, à gauche, ainsi que l’enseigne « Madras » et plusieurs publicités typiques de la fin du XIX ème siècle : peinture Ripolin, Chocolat Menier, etc.
Sortie de l’école enfantine, dans le haut de la rue Duguesclin. La plupart des enfants, coiffés de grands chapeaux de paille ou de bérets, se dirigent vers la Grand’rue où quelques parents semblent les attendre. D’autres s’arrêtent pour discuter ou pour fixer l’opérateur, intrigués. La rue en terre battue est bordée de quelques pavés. On distingue un tas de crottins qui atteste la circulation régulière de chevaux. La gélatine de la plaque photographique a subi des déformations importantes, ce qui donne à la photo une allure un peu onirique.
Deux femmes posent devant la devanture de leur boutique. Des pipes exposées dans la vitrine, à gauche et à droite, font penser à un bureau de tabac. Peut-être s’agit-il de celui qui se trouvait au 4 de la rue Gambetta et qui est visible sur une autre photo.
L’église Notre-Dame vue de la rue Gambetta. Prise en contre-plongée, la photo met en valeur la haute silhouette du clocher. L’opérateur se trouve au niveau du bureau de tabacs du 4, rue Gambetta, repérable à son enseigne en forme de pipe. À droite, on remarque le Café français dont le rez de chaussée, avec ses ouvertures en plein-cintre, est agrémenté d’arbustes en caisses.
Sortant de l’église, une procession de communiantes longe la place Notre-Dame, précédées par des garçons en costumes sombres. Les enfants portent des drapeaux de tarlatane finement galonnée, probablement aux couleurs de la Vierge Marie, le bleu et le blanc. À droite, des femmes les observent, portant de grands parapluies pour se protéger du soleil. Un petit garçon en costume marin passe entre les rangées..
Sortie de la messe dominicale à l’église Notre-Dame. La photo privilégie les personnages qui occupent toute la largeur du cadre, du café du Centre au café français, et s’attardent sur les marches pour discuter.
Le marché aux bestiaux de la place Dupin, dans la perspective de la rue de la cave. Il y a foule, et les discussions vont bon train. Les hommes portent le costume traditionnel, une blouse bleue flottante et un chapeau aux larges bords. On aperçoit une seule femme, affairée. Un homme en costume de ville, coiffé d’un chapeau melon, semble interpeller l’opérateur.
Une femme en deuil (peut-être Hélène Ardouin) pose près d’une tombe fraîchement décorée du cimetière Saint-Simon. Sur une couronne mortuaire probablement composée de perles de verre, on distingue la dédicace : « à notre soeur chérie ». De l’autre-côté du mur du cimetière, on remarque la rangée de têtards qui borde la route et la campagne vierge d’habitations.
Deux femmes en deuil descendent l’allée centrale du cimetière Saint-Simon. Elles appartiennent sans doute à la famille Ardouin-Métayer dont les tombes sont concentrées, avec celles des familles de notables de l’époque, dans la partie haute du cimetière, à l’est. La tombe en granit de Nelly Ardouin, épouse du Docteur Métayer décédée en 1913, se trouve ainsi non loin du mausolée Barbaud (érigé en 1896) qu’on distingue clairement en haut de l’allée. La décoration du cimetière est caractéristique du XIXème siècle, avec ses couronnes à ossatures métalliques placées en hauteur. On remarque, en haut à droite, la présence d’une imposante chapelle aujourd’hui disparue.
Une élégante jeune femme se promène dans un jardin ou un sous-bois. Une écriture manuscrite permet de préciser le lieu et la date du cliché : Bressuire, août 1910.
Vue du château de Bressuire depuis la rue du Péré. La photographie met en valeur la puissante tour du pilier massif, la dernière de l’enceinte extérieure, édifiée sur la partie la plus inaccessible du rocher. En haut à droite, le château « troubadour » que le maire Bathilde Bernard fit ériger à partir de 1876, année du rachat du château en ruines à la famille d’Abbadie.
Le château de Bressuire vu du chemin de la Fontaine, bordé par les murs des jardins. Au second plan, les maisons donnant sur la rue du Péré. Au centre des ruines, le château « troubadour » que le maire Bathilde Bernard fit ériger à partir de 1876.
Trois hommes circulent sur la route de Fontenay-le Comte, aujourd’hui boulevard du Guédeau, à bord d’une De Dion Bouton type S 1903. Dans le lointain, on devine le carrefour où se trouvait l’ancienne aumônerie et l’église Saint-Jacques, dont la nef a été transformée en maison. La maison à deux étages coiffée d’un toit d’ardoise existe encore, elle correspond au n°15 du boulevard. À gauche, la maison basse a disparu pour laisser place à des pavillons. Du côté droit de la route, les jardins et vergers à l’arrière-plan de la voiture sont désormais entièrement construits (laboratoire d’analyses médicales, garage, pavillons…).
Bressuire, village des Fougeries, ancien moulin, entre Puy-Rond et la Chaize avant 1900. Le poète et avocat Paul Ardouin (né en 1878) avec son canotier.